Rencontre avec Nicole Farlotti (ECP 84), présidente de la Banque Alimentaire d’Île-de-France - CentraleSupélec Alumni N°3 (mars-avril 2021)
Quand avez-vous décidé de rejoindre la Banque Alimentaire et pourquoi ?
En 2012, de retour en région parisienne, j’ai cherché une association auprès de laquelle m’engager. J’ai été sensible à la mission des banques alimentaires : aider les personnes en difficulté tout en luttant contre le gaspillage. Puis en 2017, j’ai été élue présidente de la Banque Alimentaire de Paris et d’Île-de- France.
Comment se font la collecte et la distribution de l’aide ?
La Banque Alimentaire collecte des denrées à destination de ses associations partenaires qui elles-mêmes les redistribuent aux personnes en difficulté. En 2020, pour l’Île-de-France, cela a représenté 6 700 tonnes de nourriture, réparties sur 300 associations aux activités variées – colis alimentaires, épiceries sociales, repas, maraudes – qui aident plus de 300 000 personnes.
Les magasins et les plateformes de la grande distribution donnent les produits retirés de la vente quelques jours avant leur date limite de consommation. Nous les transportons ensuite en camion frigorifique jusqu’à nos entrepôts. Les dons des industriels peuvent être des denrées non commercialisables, mais toujours consommables : surplus, produits mal étiquetés… Tous ces produits seraient détruits s’ils n’étaient pas donnés. Nos autres ressources proviennent de l’UE et de l’État, ainsi que de la collecte nationale de fin novembre, seul moment de l’année où nous faisons appel au grand public. Notre équipe comporte 12 salariés et 150 bénévoles qui se relaient pour maintenir l’activité toute l’année.
La crise du Covid-19 a engendré une recrudescence des demandes. Comment la mesurez-vous concrètement au quotidien ?
Le nombre de bénéficiaires a augmenté de 20 % environ depuis le mois de mars, et près de 50 nouvelles associations sont devenues partenaires de la Banque Alimentaire en Île-de-France. Nous avons accueilli des associations qui n’avaient pas initialement vocation à faire de l’aide alimentaire, mais qui ont dû répondre aux besoins des personnes que le confinement laissait sans revenus, ou des familles dont les enfants ne mangeaient plus à la cantine.
Les salariés licenciés en raison de la crise, ou en chômage partiel, ainsi que de nombreux étudiants font partie des nouveaux publics qui font appel à l’aide alimentaire. C’est particulièrement visible depuis le mois de septembre.
Qu’est-ce que cette crise a changé pour les banques alimentaires ?
La plupart de nos bénévoles, souvent retraités, ont arrêté leur activité, et il a d’abord fallu faire face avec notre petite équipe de salariés. Heureusement, nous avons rapidement eu du renfort avec des jeunes, des salariés en chômage partiel, qui étaient disponibles durant la journée et souhaitaient se rendre utiles. Nos associations partenaires ont dû aussi se réorganiser pour maintenir leurs activités avec moins de bénévoles, en respectant les mesures de distanciation sociale.
Au printemps, nous avons distribué deux fois plus d’aide que sur la même période de l’année précédente. Nos stocks ont diminué très rapidement, malgré la générosité de certains donateurs industriels et un afflux de produits frais, en raison de la fermeture des restaurants et des cantines. Nous avions beaucoup d’inquiétudes pour la collecte de novembre, mais là encore la générosité a été au rendez-vous, et nous avons même dépassé le résultat de l’an passé.
Et quels sont les défis à venir à court et moyen termes ?
Les demandes de nouvelles associations continuent d’affluer. Nous allons sans doute devoir réorganiser notre fonctionnement pour recevoir ces nouveaux arrivants dans un espace contraint. Au niveau des stocks, nous pouvons répondre aux besoins pour les mois qui viennent grâce à la collecte et à l’aide de l’État en hausse pour 2021. Mais l’élan de générosité qui s’est manifesté en 2020 risque de retomber, en revanche les personnes en grande difficulté vont devoir être accompagnées pendant longtemps. Il va donc nous falloir trouver de nouveaux financements, et des sources d’approvisionnement supplémentaires. Enfin, nous devrons recruter quelques bénévoles sur des postes clés, et remplacer ceux qui partiront une fois la crise passée.
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