Remue-Méninges : à la recherche de la vie sur Mars - N°4 (mai-juin 2021)
Le 13 avril, Valérie Ciarletti (ECP 84) était invitée à présenter son travail sur la future mission ExoMars, dont l’objectif est de détecter les traces d’une éventuelle vie sur la planète rouge. Plus de 70 alumni (parfois avec leurs enfants) sont venus l’écouter en ligne et rêver d’espace.
Le rover au Chili, durant une campagne de simulation d’opérations. Copyright : © E. Allouis Astrium.
Et, en vignette, le site d’atterrissage Oxia Planum, vu de l’orbite / copyright : © NASA JPL University of Arizona
Professeur à l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines et chercheuse au Latmos (Laboratoire atmosphères, milieux, observations spatiales), Valérie Ciarletti (ECP 84) participe depuis des années au programme ExoMars, qui a pour but de déterminer si la vie est apparue sur notre voisine. « Aujourd’hui Mars et la Terre sont très différentes, mais au moment de l’apparition de la vie sur notre planète, il y a un peu plus de 4 milliards d’années, les conditions sur les deux planètes étaient très proches. Il est donc tout à fait possible que Mars ait aussi abrité des formes de vie primitive », explique-t-elle. Cette période martienne, appelée Noachien, se retrouve logiquement dans sa géologie. Or, si sur Terre les traces de cette époque ont été largement perdues à cause de la tectonique, de l’érosion et de la vie elle-même qui s’est développée, Mars n’a pas souffert de ce type de dégradations. Encore faut-il pouvoir fouiller sur place.
Collaboration européenne
C’est précisément l’objectif du rover Rosalind Franklin1, qui devrait décoller à destination de Mars en septembre 2022. « Les orbites de Mars et la Terre sont ainsi faites que les deux planètes se retrouvent proches tous les deux ans. Nous avons raté le coche de l’été 2020, il a donc fallu reporter le lancement à 2022. »
Le véhicule, résultat d’une collaboration entre différents pays coordonnés par l’Agence spatiale européenne (ESA), est un vrai petit laboratoire d’analyse mobile. En effet les radiations spatiales, non atténuées par l’atmosphère martienne ténue, ont certainement dégradé les traces de molécules organiques en surface. Il va donc falloir creuser au-delà d’un mètre de profondeur pour trouver d’éventuelles molécules organiques intactes.
Le rover est ainsi équipé d’une foreuse et de tout un panel de détecteurs et d’analyseurs. « Mon équipe a travaillé sur le radar WISDOM – Water, Ice and Subsurface Deposit Observation on Mars – qui permettra de déterminer les zones intéressantes à creuser. Nous l’avons testé sur les pentes de l’Etna, dans le désert d’Atacama au Chili… Tout a été testé, validé et stérilisé, afin notamment de ne pas importer sur Mars de molécules organiques terriennes. »
Ce qui, non seulement, fausserait les analyses, mais risquerait d’introduire des microorganismes susceptibles de se reproduire sur place. « Les simulations d’opération dans des conditions proches de celles de la mission sur Mars sont indispensables. La première fois que nous avons envoyé depuis le centre de commande en Europe une commande au rover situé au Chili afin qu’il tourne à droite pour prendre une photo, nous avons réalisé le lendemain en recevant les données qu’il avait tourné à gauche, à cause d’une confusion sur l’orientation de l’axe de rotation considéré. Le genre de problème que vous n’avez pas envie de découvrir sur Mars ! »
Analyses in situ
Cette mission sera la première depuis les missions Viking à effectuer les analyses in situ : les échantillons prélevés seront étudiés dans le corps du rover, qui va rechercher la présence de molécules organiques et notamment essayer de déterminer si elles sont bien d’origine biologique. « À titre de comparaison, la mission Perseverance qui est actuellement sur Mars n’analyse pas directement : elle prélève des échantillons qui seront étudiés, de manière beaucoup plus approfondie, à leur arrivée sur Terre. »
Les nombreuses questions des participants à la réunion, y compris d’enfants d’alumni manifestement passionnés par l’espace, témoignaient de la fascination qu’exerce encore le sujet. Et de l’envie de s’évader, loin, bien au-delà des 10 km réglementaires…
Julien Meyrat
1. Baptisé ainsi en hommage à la physico-chimiste trop souvent oubliée, pionnière de la biologie moléculaire ayant découvert la structure hélicoïdale de la molécule d’ADN.
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