Face à Face avec Olivier Roussat, directeur général du groupe Bouygues - N°4 (mai-juin 2021)
« Notre seule richesse, ce sont les collaboratrices et les collaborateurs »
Olivier Roussat, directeur général du groupe Bouygues, était l’invité du Face à Face du 6 avril. Il a présenté les grandes orientations du groupe et répondu aux questions des participants qui assistaient en direct à la conférence en ligne.
Une société de services
« Bouygues est une société fondée sur des valeurs fortes, notamment la transmission, la fidélité, la loyauté. Je suis moi-même ingénieur, entré dans le groupe en 1998. Quel que soit le domaine, l’immobilier, la construction, les télécommunications, les médias ou les routes, nous croyons fermement que notre seule richesse, ce sont nos collaboratrices et nos collaborateurs.
Dans ce contexte, l’acculturation peut être longue, et la transmission est une notion clé, c’est pourquoi nous ne recrutons pas, ou très peu, en externe ; il n’y a pas de parachutage, nous privilégions les parcours en interne. »
Le développement durable
« Notre prise de conscience n’est pas venue d’une demande gouvernementale mais de l’interne, et ce dès 2018 : nos actionnaires comme nos collaborateurs exerçaient une pression de plus en plus forte. Aujourd’hui, pour attirer les jeunes, il faut montrer qu’on a dépassé les effets d’annonce et que des mesures concrètes sont en cours. Le secteur de la construction est à l’origine d’environ 30 % des émissions de gaz à effet de serre, nous avons donc un rôle important à jouer.
Les politiques publiques se révèlent parfois plus timorées dans les actes que dans les discours : nous pensons que la clientèle privée peut amorcer le mouvement, si on lui propose des outils adéquats. Nous avons donc développé des solutions qui devraient être demandées dans les futurs plans de relance. »
Mixité et diversité
« Notre objectif est que la proportion de femmes managers reflète fidèlement le pourcentage de femmes dans l’entreprise.
C’est un travail que nous avons notamment initié au sein de Bouygues Telecom depuis dix ans, et les résultats commencent à se faire sentir. Nous avons une démarche similaire en ce qui concerne la diversité. Ce n’est pas un objectif politique : si on veut que les collaborateurs donnent le meilleur d’eux-mêmes, il faut que lors de la convention de fin d’année, chacun puisse se projeter au niveau du comité exécutif et se dire : “dans quelques années, ce pourrait être moi !” Et c’est impossible si on n’y trouve que des hommes blancs. »
Le futur du groupe
« Nous allons développer certains secteurs, essentiellement sur trois zones géographiques à fort potentiel : l’Amérique du nord, l’Europe du Nord et l’Allemagne. Dans le secteur routier, les pays du Nord disposent de fonds importants – comme le fonds Biden aux États-Unis, qui représente une grosse opportunité – et d’un climat propice à une rentabilité à long terme.
Quant à l’Allemagne, elle fait partie des pays qui sortiront plus forts de la crise sanitaire.
Nous prenons également acte de l’impact futur du programme IMO 20201, qui va à terme réduire la production de bitume. Ce matériau étant indispensable à la fabrication des routes, nous avons commencé à approvisionner des centres de stockage. Autre secteur à développer : l’énergie et les services, dont la rentabilité peut atteindre 5 à 10 %. Dans ce domaine, les petits projets sont les plus rentables, et ce n’est pas la spécialité de Bouygues Construction, nous y travaillons donc depuis deux ans. Quant aux médias, l’actionnaire de référence de M6 a annoncé qu’il comptait faire évoluer sa position, nous y réfléchissons. »
L’évolution du métier d’ingénieur
« Dans un monde qui va vite, l’essentiel est de s’intéresser à ce qui se passe, de vouloir changer, progresser… À titre d’exemple, le digital est en train de transformer durablement la construction, et on a besoin de collaborateurs curieux pour suivre et comprendre ce qui est en train de se passer. »
Propos recueillis par Julien Meyrat
1. Ce projet de l’Organisation maritime internationale vise à réduire les émissions d’oxydes de soufre des navires (www.imo.org). Indirectement, il devrait conduire à une baisse de la production de bitume dans le monde.
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