Face à Face avec Jean-Bernard Lévy - EDF et la neutralité carbone - Revue N°2 (janvier-février 2021)
Le 19 novembre, c’est pour la première fois en téléconférence qu’a eu lieu le Face à Face de l’association. Philippe Sajhau (S 83), vice-président Rayonnement de CentraleSupélec Alumni, relayait les questions du chat à Jean-Bernard Lévy, président-directeur général d’EDF, venu évoquer les relations de l’opérateur historique avec la neutralité carbone.
La raison d’être d’EDF
« Lors de l’assemblée générale d’EDF en mai 2020, nous avons adopté notre “raison d’être” qui est tournée vers la lutte contre le changement climatique, mais en y insérant les notions de progrès et de confort. Nous ne croyons pas à la stagnation séculaire que souhaitent certains, nous restons porteurs d’une notion de service public et de contribution au progrès de l’humanité. »
L’hydrogène
« Actuellement, l’hydrogène obtenu à partir d’hydrolyse reste cinq fois plus cher que son équivalent, sous-produit de l’industrie pétrochimique. Mais à terme, l’hydrogène décarboné pourra se substituer au carboné dans certains processus, comme la fabrication d’engrais. La chimie de l’hydrogène représente 2 à 3 % des émissions de CO2, l’équivalent du transport aérien, ce n’est donc pas négligeable. Il peut également servir à propulser des véhicules, plutôt dans le cadre du transport lourd : bateaux, poids-lourds, transports en commun… Les conditions de stockage dissuaderont sans doute de l’utiliser pour les véhicules individuels. »
Le nucléaire
« EDF exploite le plus grand parc nucléaire du monde – le parc nord-américain est plus vaste, mais divisé entre plusieurs opérateurs. Nous avons notamment racheté les activités nucléaires britanniques. Le Giec comme l’Agence internationale de l’énergie appellent tous deux à doubler le parc mondial d’ici 2040. Les principales constructions sont en Asie, dans les pays émergents… EDF prépare à la demande du gouvernement un dossier en vue d’une décision sur la construction de 6 EPR en France. Cette décision sera prise probablement après les élections présidentielles. Concernant la fusion nucléaire et ITER, nous n’avons pas vocation à faire autre chose que de la veille sur le sujet, qui est entre les mains du CEA. La 4e génération, elle, repose sur notre bonne connaissance du réacteur refroidi au sodium, des études devenues difficiles depuis que l’État a fermé le projet. Il y a également un engouement pour les réacteurs modulaires SMR, avec des prototypes en construction un peu partout. Ce sont des dispositifs économiques et intéressants, mais nous n’allons pas remplacer tout notre parc avec.»
Le stockage
« Depuis trois ans, nous avons un plan stockage en cours, qui passe par différents moyens. Le plus accessible, ce sont les barrages : nous réclamons vigoureusement de remettre les stations de pompage à l’ordre du jour, elles permettent un énorme stockage en contrepartie d’une empreinte écologique relativement faible. Il ne s’agit plus d’inonder toute une vallée comme il y a soixante ans ! Nous continuons également de travailler sur les batteries, notamment pour les faire passer d’un usage mobile à un usage stationnaire. »
Le prochain grand défi
« Nos décisions sont-elles neutres, positives ou négatives vis-à-vis du changement climatique ? Il va encore falloir du temps avant que cette question ne devienne un réflexe systématique, même si la prise de conscience collective a progressé. On voit que les subventions envers les énergies fossiles sont encore très importantes, y compris en France. On est à des années-lumière d ’un monde où la sobriété énergétique serait prégnante. » n
Propos recueillis par Julien Meyrat
Les alumni et la neutralité carbone
Pablo Santamaria (ECP 83), PDG de Formitel, a profité du Face à Face pour présenter les résultats d’un sondage effectué auprès des dirigeants alumni (avant la pandémie de Covid-19, convient-il de préciser). Il en ressort que si une large majorité de participants (80 %) estime la neutralité carbone très importante et attend d’EDF qu’elle s’implique sur le sujet, beaucoup moins (50 %) pensent qu’il faut favoriser l’éolien ou investir dans la mobilité électrique. Très peu enfin (20 %) trouvent réaliste l’ambition européenne du 100 % neutre en 2050.
Vidéo enregistrée le 19 novembre 2020
Pour commander le N°2 (janvier-février 2021) ou s’abonner à la revue CentraleSupélec Alumni : https://bit.ly/2LZeXUT
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