Face à Face avec Delphine Ernotte-Cunci (ECP 89) - CentraleSupélec Alumni N°3 (mars-avril 2021)

Éduquer, divertir et informer

Le 2 février, un Face à Face était organisé en ligne avec Delphine Ernotte-Cunci (ECP 89), présidente de France Télévisions et du conseil d’administration de l’école CentraleSupélec. Morceaux choisis.

Le modèle France Télévisions
« Nous sommes une société anonyme à capital 100 % public, l’État étant notre seul actionnaire. France TV regroupe les chaînes France 2, France 3, France 4 et France 5, plus neuf médias globaux ultramarins – radio/télé/web. Cela représente un staff de 9 000 personnes, la moitié travaillant en région ou outre-mer. Bien que nous n’employions aucun fonctionnaire, nous exerçons une mission de service public fondamentale : éduquer, divertir et informer. Ce dernier point est central, comme en témoigne notre nouvelle chaîne d’information en continu, France Info, lancée il y a quatre ans. France TV est financé à 85 % par la redevance, le reste relevant de la publicité. »

Les grands défis
« La télévision est un “vieux média” qui reste regardé par quatre Français sur cinq, 3h40 par jour en moyenne hors confinement. Bien sûr, depuis un an, le besoin a fortement augmenté, de même que l’offre : Netflix, Disney, Amazon, Canal +… En réaction, nous avons d’une part poursuivi le travail sur France Info, en instaurant notamment une alliance avec Radio France pour le recoupement des informations. C’est essentiel en ces temps où les fake news circulent très facilement. Parallèlement, nous essayons de renouveler nos capacités de création. Nous n’avons pas les moyens de Netflix, mais les fictions françaises sont tout de même très suivies et appréciées. Je suis depuis le 1er janvier présidente de l’Union européenne de radio-télévision, qui regroupe 117 organisations dans 56 pays. Cette alliance va nous permettre de coproduire des séries plus ambitieuses. »

Faire supporter la solitude
« Enfin, la télévision comble aujourd’hui un problème important : la solitude, qui rend la vie particulièrement difficile en ces temps de pandémie. Depuis le premier confinement, nous avons adapté nos grilles pour accompagner les familles. France 4 a été transformée en “salle de classe” en partenariat avec le ministère de l’Éducation nationale pour aider les parents à assurer les cours à leurs enfants coincés chez eux. Nous venons en outre de lancer Culturebox, une nouvelle offre destinée à diffuser des captations de spectacles vivants, jusqu’à la réouverture des lieux culturels. »

Féminisme et diversité
« Je suis féministe, et je me suis battue pour que l’on arrive à la parité à l’antenne. Mais je déplore qu’il n’y ait toujours que 20 % de femmes à CentraleSupélec. Les médias ont une part de responsabilité : il nous faut montrer plus de femmes, notamment scientifiques. La diversité, sous toutes ses formes, est d’ailleurs réclamée par le public. Nous avons travaillé sur un annuaire de femmes expertes afin que les rédactions, qui travaillent toujours un peu dans l’urgence, sachent qui appeler. Et nous avons initié pour ces expertes des formations à la prise de parole, car tout le monde ne sait pas s’exprimer facilement dans les médias. »

CentraleSupélec
« J’ai la chance de pouvoir m’appuyer sur un très bon conseil d’administration et une direction très engagée. Celle-ci a immédiatement compris quels seraient les problèmes des élèves, les difficultés financières dues au manque de petits boulots, l’isolement familial... Romain Soubeyran a insisté pour que le week-end d’intégration soit maintenu, et il a bien fait. Sur le long terme, nous travaillons à la construction de l’université Paris-Saclay. Ce sont des coopérations complexes à mettre en place, mais notre arrivée en 13e place du classement de Shanghai aurait été impossible sans cet arrimage à Paris-Saclay. »


Propos recueillis par Julien Meyrat