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Cycle Alumni à la une - L’impact du Covid-19 sur la mondialisation – Revue N°2 (janvier-février 2021)

L'article de la semaine

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10/02/2021

Les deux intervenants, Sébastien Jean et François-Xavier Oliveau.


L’impact du Covid-19 sur la mondialisation

Le 5 novembre 2020, Philippe Sajhau (S 83) interrogeait au cours du premier webinaire du cycle « Alumni à la une » Sébastien Jean (ECP 91), directeur du Centre d’études prospectives et d’informations internationales, et François-Xavier Oliveau (ECP 93), directeur associé transformation chez Initiative & Finance et essayiste, sur les impacts de la crise du Covid-19 sur la mondialisation. Morceaux choisis.


Quels sont les effets de cette crise ?

Sébastien Jean : Le choc a été profond et subit. C’est une crise très inégalitaire entre les différents secteurs, autant lors de l’impact que des rebonds respectifs. La santé et l’agro-alimentaire ont été peu touchés au départ, la consommation est vite revenue ; en revanche pour le tourisme, les transports ou le divertissement, c’est de l’ordre de la catastrophe naturelle. À court terme, il y a un impact massif sur la trésorerie. L’État a mis l’économie sous cloche pour limiter les dégâts, mais la question des faillites se posera rapidement, avec une augmentation massive à prévoir prochainement. Nous avons plongé dans un monde qui sera durablement différent.

François-Xavier Oliveau : L’après-crise sani­taire devrait voir deux grandes tendances : une baisse de la demande, déjà relativement faible dans les pays industrialisés, et une numérisation accrue des comportements, qui réduit les coûts de production et distri­bution : on a « gagné » cinq ans en termes de pénétration du télétravail, du paiement et des achats en ligne… Combinés, les deux phéno­mènes vont produire une très forte pression à la baisse sur les prix dans les années à venir.


La croissance modérée, voire négative, est souhaitée par certains : serait-ce l’occasion de relier les deux visions ?

FXO : La question ne se pose pas en ces termes. L’innovation a deux conséquences : produire plus et faire baisser les prix. Dans les prochaines années, les gains de productivité vont surtout se traduire en baisse des prix faute de demande. Or le problème, c’est que nous gérons très mal cette baisse des prix par une politique monétaire inadaptée. Nous avons créé une société d’abondance incroyable, mais elle se traduit dans la baisse des prix que nous maîtrisons mal plus que dans la croissance.

SJ : Je ne suis pas non plus partisan de la décroissance. Cette crise semble provoquer un enchaînement macroéconomique négatif : beaucoup de chômage, des ménages inquiets qui consomment moins, donc peu d’investissements… ce qui amoindrit les perspectives et va encore accentuer la chute de la demande.


Les plans de relance très forts proposés par le Gouvernement seront-ils suffisants ?

SJ : L’intervention massive de l’État, dont la justification n’est pas sujette à débat, va certainement durer. D’autant qu’avec le très faible taux d’intérêt actuel, qui ne devrait pas remonter avant longtemps, la politique monétaire est moins efficace que la politique fiscale. Cette intervention permet en outre d’orienter les investissements, en faveur de l’adaptation contre le changement climatique à long terme, et de la protection des entreprises et de la population à court terme.

FXO : Aux États-Unis, le soutien à la croissance et à la stabilité des prix est passé par des chèques distribués aux citoyens. En Europe, la Banque centrale peut en faire autant, sans même de contrepartie nécessaire. La capacité d’endettement de notre économie touche ses limites. En outre, en faisant augmenter le prix des actifs, la dette fait exploser les inégalités. Nous allons devoir repenser radicalement la façon dont nous créons de l’argent.


Plus de numérique ne signifie-t-il pas plus de risques ? On parle beaucoup de sa forte empreinte carbone…

FXO : Par essence, cela implique bien sûr plus de cyber-risques, mais ça n’empêchera pas la croissance du numérique. Quant à l’empreinte carbone numérique, elle reste bien inférieure à celle de l’automobile ou de l’aérien, et elle est liée au fait que l’énergie est actuellement carbonée. Or les coûts des énergies propres connaissent des chutes hallucinantes, de l’ordre de 20 % par an… On peut très bien imaginer d’ici dix à quinze ans un photovoltaïque stocké compétitif face aux énergies fossiles !

SJ : Je pense en outre que nous allons vers une période géopolitiquement compliquée. Les États-Unis et la Chine sont dans une logique de domination. Nous avons beau être plus avancés dans la lutte contre le changement climatique, cela ne résoudra pas le problème si nous n’avons pas d’influence sur les comportements des autres. Nous devons être moteurs, et il faut s’en donner les moyens. 


Propos recueillis par Julien Meyrat



Vidéo enregistrée le 5 novembre 2020



Pour commander le N°2 (janvier-février 2021) ou s’abonner à la revue CentraleSupélec Alumni : https://bit.ly/2LZeXUT


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